Marlene Dietrich : L’ange bleu ou la Vénus blonde

Des actrices mythiques du 20e siècle, il en existe plusieurs, mais qui d’autre fit son entrée à Hollywood comme femme fatale en smoking et haut de forme? Je vous présente ce mois-ci une actrice d’origine Allemande, naturalisée Américaine et qui, francophile, finit ses jours à Paris : Marlène Dietrich.

Marie Magdalene Dietrich vit le jour le 27 décembre 1901 à Schöneberg en Prusse (aujourd’hui un quartier de Berlin en Allemagne). Sa mère, Wilhelmina Elisabeth Josefine née Felsing, est héritière d’une famille bourgeoise de joailliers et horlogers, tandis que son père, Louis Erich Otto Dietrich, est lieutenant dans la police impériale prussienne. Elle a une sœur aînée d’un an, Elizabeth. Les deux jeunes filles sont élevées de manière stricte dans une discipline quasi-militaire.

M. Dietrich décède malheureusement en 1907. Son meilleur ami, un capitaine de cavalerie du nom d’Eduard von Losch, épousera Mme. Dietrich (devenue von Losch) en 1914, mais sera tué sur le front en 1916 avant d’avoir pu officiellement adopter ses deux belles-filles.

Marie Magdalene décide à 11 ans de combiner ses deux prénoms en un seul et devient ainsi Marlene. Durant son adolescence, elle développera un goût pour les arts, particulièrement la musique et le chant. En 1918, elle poursuivra des études à l’École supérieure de musique Franz-Liszt de Weimar où elle apprendra le violon, en plus de commencer à exercer ses charmes légendaires sur les hommes ; en effet, son professeur privé de violon deviendra son premier amant, tombant à ce que l’on dit sous le charme de son regard de chambre à coucher. Il fut remercié lorsque l’on découvrit cette liaison avec une élève. À l’époque, Marlene envisage une carrière de violoniste d’orchestre ; elle obtient même quelques postes de violoniste pour des projections de films muets à Berlin, mais une blessure au poignet mit fin à ce rêve.

Au début des années 1920, Marlene entre dans le monde des cabarets, d’abord comme danseuse de troupe, puis comme chanteuse. Elle suit des cours de théâtre auprès de Max Reinhardt, ce qui lui permet d’obtenir de petits rôles au théâtre dans des revues humoristiques. En 1923, elle se retrouve pour la première fois dans une production cinématographique, Le Petit Napoléon.

En mai de cette même année, elle épouse Rudolf Sieber avec qui elle aura une fille, Maria Elisabeth Riva (née Sieber), née en décembre 1924. Le couple ne résidera ensemble que cinq ans, mais demeurera néanmoins marié jusqu’au décès de Rudolf en 1976.

Marlene Dietrich et Josef von Sternberg

Vers la fin des années 1920, Marlene enregistre ses premières chansons, ce qui la fera remarquer du réalisateur Josef von Sternberg. Ce dernier la mettra en vedette dans son film L’Ange Bleu (1929) où elle interpréte avec brio le rôle de Lola-Lola, une chanteuse de cabaret. Le film obtient un succès international et von Sternberg convainquît Marlene de venir s’installer à Hollywood, où Paramount n’est que trop heureux de lui offrir un contrat. À son arrivée en sol américain, le réalisateur la couvre de cadeaux, dont une Rolls-Royce Phantom II verte que l’on pourra apercevoir dans leur prochain film, Cœurs brûlés (1930), dans lequel elle interprète à nouveau une chanteuse de cabaret, cette fois-ci aux côtés de Gary Cooper. On l’y voit chanter une chanson française, habillée de vêtements typiquement masculins, et embrasser une femme. C’était bien évidemment avant le code Hays de censure à Hollywood ! Elle remportera en 1931 l’oscar de la meilleure actrice pour ce rôle.

Entre 1930 et 1935, Marlene aura la vedette de pas moins de six films de von Sternberg, son amant avec qui elle vit avec sa fille Maria, dans lesquels ils travailleront de concert afin de lui construire une image de femme fatale mystérieuse et séduisante. Outre Cœurs brûlés, ces films incluent Agent X 27 (1931), Shanghaï Express (1932) avec Anna May Wong, Blonde Vénus (1932), L’impératrice Rouge (1934) et La femme et le Pantin (1935). Leur relation souvent houleuse fait éclater leur couple après ce dernier film ; il faut dire que Marlene aimait bien séduire ses co-vedettes, multipliant les amourettes, ce qui n’était pas toujours facile pour Josef. Elle lui dira « j’étais mariée quand tu m’as connue, tu ne t’attendais pas à ce que je sois fidèle ! »

Marlene Dietrich dans Shangaï Express

Actrice la mieux payée de l’époque, Marlene continuera d’interpréter des rôles de femmes fatales dans d’autres productions comme Le Jardin d’Allah (1936), Le Chevalier sans armure (1937), ou Ange (1937), mais ces films ne remportèrent pas le succès attendu, et la presse se mit à la surnommer « poison de box-office ». Elle se prit deux années de vacances sur la riviera méditerranéenne (pause durant laquelle elle enchaîna les amants et les amantes) avant de revenir à Hollywood jouer dans son premier western, Femme et Démon (1939) avec James Stewart, qui remporta un succès commercial et valut à sa carrière un second souffle.

Être une femme fatale ne la rendait pas moins intéressée à la politique. Lorsqu’elle apprit la décision du roi Édouard VIII d’abdiquer pour épouser la divorcée Wallis Simpson, elle affirma qu’elle se rendrait auprès du roi pour le séduire afin de le convaincre de rester sur le trône et ainsi sauver la monarchie britannique. L’histoire dit que son plan échoua lorsqu’elle fut arrêtée à la barrière.

Avec l’entrée des États-Unis dans la seconde guerre mondiale, Marlene prit résolument position contre le nazisme et se joindra même à l’United Service Organizations (USO), faisant la tournée des troupes avec d’autres vedettes et chantant pour les soldats de sa patrie d’adoption. Sa fille et biographe nous dit d’ailleurs qu’elle était prête à tout donner à la cause, y compris son corps. Après tout, si un jeune homme de la campagne pouvait avoir la chance de passer la nuit avec une vedette de cinéma ne serait-ce qu’une fois avant de sacrifier sa vie sur le champ de bataille, n’était-ce pas là une vie qui avait valu la peine d’être vécue ?

De retour à Hollywood, elle joue avec réticence dans La Scandaleuse de Berlin (1948) de Billy Wilder, n’aimant pas être associée au parti national socialiste de sa terre natale, mais Wilder lui laissa l’opportunité de montrer son côté comique, ce qui lui fit accepter le rôle.

En 1950, elle joue dans Le Grand Alibi (1950) d’Alfred Hitchcock, pour lequel son amie Edith Piaf lui « prête » sa chanson, La vie en rose, qu’elle interprète habillée de Dior. Une belle preuve de son amour pour tout ce qui est français, non ? Et on ne parle pas seulement de Jean Gabin, avec qui elle eut une importante relation.

Avec la cinquantaine et les offres de rôles diminuant, Marlene réinvente sa carrière pour aller se produire en chanson à Las Vegas. Dès 1953, c’est au Sahara Hotel qu’on peut assister à ses prestations. Retrouver un public de cabaret lui redonne vie. Elle aimait être aimée. Accompagnée de Burt Bacharach, son dernier amant en liste (on en a perdu le compte), elle débute en 1960 une tournée mondiale. Elle présentera son spectacle en Europe, mais aussi en Israël et en URSS. En 1967, elle triomphe à Broadway, obtenant l’année suivante un prix Tony honorifique.

Marlene Dietrich, 1963

Après une chute dans la fosse de l’orchestre en 1973 due à un abus d’alcool et une seconde chute à l’Opéra de Sydney en 1975, sa carrière au Music-Hall prend fin. Elle jouera dans un dernier film, C’est mon gigolo en 1978, avant de se cloîtrer dans son appartement parisien, restant alitée et ne recevant que la visite de sa fille et de quelques amis proches.

Elle s’éteint en 1992 à l’âge de 90 ans. Quoique ses obsèques furent célébrées à Paris, elle est enterrée à Berlin, non loin de sa mère. En 2001, lors d’une célébration pour son centenaire, on apprend qu’elle se serait probablement suicidée en avalant une large quantité de somnifères.

En 1993, l’état allemand réussit à racheter l’ensemble des biens de cette grande actrice, incluant 3000 vêtements, 1000 pièces de sa garde-robe, 16 500 photographies, des documents écrits, des affiches de films, des meubles, des bagages, etc. Le tout est entreposé et exposé au Musée de cinéma et télévision de Berlin.

Pour en savoir plus :

Marlene Dietrich – Wikipedia

Marlene Dietrich – IMDB

La vie et l’oeuvre de Marlene Dietrich racontées par A. Lavoie

Marlene Dietrich : No Angel – A Life of Marlene Dietrich

Musée de cinéma et télévision de Berlin

Evie B. Sweet

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